À Rennes, le 24 octobre 2022
Le 13 octobre dernier, puis le 18 octobre, nous alertions sur la situation d’extrême précarité dans laquelle vivent actuellement plusieurs dizaines d’enfants à Rennes. Qu’ils dorment sous tente au bidonville des Hautes Ourmes (quartier de la Poterie), dans des squats, dans leur voiture, dans les écoles de la ville où des parents d’élèves ont décidé de les mettre à l’abri ou, pour les plus chanceux d’entre eux, dans des hébergements d’urgence d’où ils seront prochainement remis à la rue, leur situation est insupportable.
Depuis déjà trop longtemps, les traumatismes répétés, l’humiliation constante inhérente à leur condition, leur exil, impactent gravement et durablement leur état de santé psychique et somatique. Ces enfants ont besoin d’une trêve, de repos, pour recevoir soins et éducation. Ils ont besoin de l’attention de parents qui n’ont souvent plus assez de temps à leur consacrer, trop occupés à des démarches administratives complexes ou à échapper à une expulsion du territoire dont ils rejettent l’éventualité. Ils ont besoin d’une dignité retrouvée. C’est le sens de l’action que nous, parents d’élèves des écoles de Rennes, menons depuis plusieurs semaines.
Cette action, complémentaire de celles menées par les associations d’aide aux personnes précaires et aux exilés, est fondée sur deux axes : protéger et alerter.
Face à l’urgence absolue de l’absence d’hébergement, nous avons décidé de mettre ces enfants et leurs familles à l’abri dans nos écoles. Nous estimons agir en citoyennes et citoyens en mettant des locaux publics à leur disposition, les protégeant ainsi des aléas climatiques, qui tendent à devenir plus fréquents à l’approche de l’hiver, et des violences qui peuvent parfois se développer dans les campements. Cette décision, préalable à toute autre, mobilise actuellement des centaines de parents d’élèves de toute la ville et n’a pas vocation à durer. Les individus ne peuvent se substituer aux pouvoirs publics dans leur mission de mise à l’abri des populations.
C’est pourquoi nous avons sollicité, en parallèle, des entretiens avec la Mairie de Rennes, le Département d’Ille-et-Vilaine, la Préfecture d’Ille-et-Vilaine, le Rectorat de l’Académie de Rennes et les quatre députés rennais.
À l’exception de Claudia ROUAUX, députée de la 3ème circonscription d’Ille-et-Vilaine, tous les autres destinataires de nos communiqués ont pris contact avec nous.
Frédéric MATHIEU, député de la 1ère circonscription d’Ille-et-Vilaine, nous a répondu le 13 octobre suivre l’évolution de la situation des enfants à la rue. Nous n’avons eu aucun contact postérieur à cette date.
Le Rectorat de l’Académie de Rennes nous a répondu le même jour transmettre notre demande à la Direction départementale des services de l’Éducation nationale d’Ille-et-Vilaine qui est en charge de l’enseignement primaire, service qui n’a jamais donné suite.
Mickaël BOULOUX, député de la 8ème circonscription d’Ille-et-Vilaine ne nous a pas répondu directement. Il s’est toutefois exprimé sur le sujet lors de la séance de questions au gouvernement, le 18 octobre, interpellant la Première Ministre Élisabeth BORNE sur la situation des enfants à la rue. Nous le remercions sincèrement pour sa prise de parole.
Toutes les autres parties nous ont invité à les rencontrer entre le 14 et le 22 octobre. La teneur des discussions varie bien évidemment d’un entretien à l’autre, et les retranscrire toutes serait trop fastidieux. Cependant, nous pouvons annoncer qu’à ce jour aucune solution pérenne d’hébergement n’a pu être trouvée pour les familles.
La Ville de Rennes soutient notre mouvement, et les élues et élus s’affichaient même à nos côtés lors d’une action coordonnée dans les écoles le 19 octobre, mais ne fera rien de plus que ce qu’elle fait déjà en matière d’hébergement d’urgence.
Les élues du Département rencontrées soutiennent également nos actions, mais ne proposent concrètement aucune solution.
La Préfecture d’Ille-et-Vilaine nous dit attendre les ordres d’Olivier KLEIN, ministre délégué à la Ville et au Logement, et Charlotte CAUBEL, secrétaire d’État chargée de l’Enfance, après leur annonce, le 19 octobre, qu’aucun enfant ne serait à la rue cet hiver.
Laurence MAILLART-MÉHAIGNERIE, députée de la 2ème circonscription d’Ille-et-Vilaine, se dit scandalisée par la situation, sans avoir plus à offrir dans l’immédiat.
Nous jugeons irresponsable cette absence de courage politique, d’où qu’elle émane. Nous attendons des pouvoirs publics qu’ils s’engagent immédiatement pour soulager ces enfants sans toit, leurs familles, les associations et les parents d’élèves qui, en permanence, suppléent leur inaction. Nous sommes toujours ouverts à la discussion, même si la déception domine après le premier round. Et nous continuerons et étendrons nos actions tant qu’une solution durable ne sera pas trouvée pour toutes ces familles, indépendamment de leur situation administrative. Qu’ils en soient sûrs.
Les collectifs réunis de parents d’élèves des écoles rennaises Camille Claudel, Clémenceau, Contour Saint-Aubin, Gantelles, Ille, Jean Zay, Joseph Lotte, La Poterie, Liberté, Léon Grimault, Marie Pape-Carpantier, Oscar Leroux et Trégain, et des collèges Clotilde Vautier et La Binquenais